JUNGLE, fresque en studio.

Chaque artiste a sa singularité. Celle de Rémi Bertoche est celle d’une peinture débordante de couleurs, de surface, de productivité, d’énergie et doublée d’une vie tout aussi trépidante et insatiable, jouant à tout instant son va-tout. L’homme en est à son quatrième livre d’art auto-produit, mais sa vie est déjà un roman que même l’écrivain le plus narratif aurait peine à écrire. De fait, Rémi Bertoche, faut arriver à le suivre ! Pour autant il a deux constances dans la vie: 1) la vague que le surf lui a mis dans la peau et dont l’énergie aussi puissante que volatile, aussi cassante qu’enthousiasmante coule bel et bien désormais dans son sang. 2) la peinture donc dont le coup de pinceau s’avère être aussi proliférant qu’infatigable, aussi relevé que spontané, avec cette aptitude technique de n’avoir crainte d’aucun sujet (même si le surf en est le thème principal), d’aucune surface (toile ou façade), avec une minutie et une rapidité dans le geste, déconcertantes pour qui le voit à l’œuvre.

Rémi Bertoche est un autodidacte de tout, mais mis à l’océan et à l’art par des parents qui en avaient le goût. Donc Rémi n’a pas appris de métier mais il a fait du surf et de l’art le chemin de sa vie au point d’en devenir un homme de métier. Côté surf il s’est vacciné à la compétition, au monitorat, à l’édition de magazines, à la création de salons professionnels et par ses tournées artistiques auprès des surfshops de France et d’Europe, il en connaît les ficelles du commerce. Côté art il a fait du surf, de la vague, de l’océan l’exploration et l’apprentissage de ses tableaux, mais quand son regard (par commandes comme par plaisir) s’est porté aussi ailleurs (le golf, le polo, la formule 1, les stars…) la floraison de sa production ne s’est pas amoindrie. 

Avec son style reconnaissable (mais plus divers et nuancé qu’il n’y paraît), Rémi Bertoche peint tout ce qu’il veut, tout ce que vous voulez. C’est comme ça que le petit surfeur des Landes s’est retrouvé à peindre aux Emirats Arabes, pour le Prince Albert de Monaco et à multiplier des tableaux de stars du cinéma pour les chambres du Carlton à Cannes…

Tout artiste a une dimension égocentrique obligée puisqu’il crée à travers le prisme de sa personne et donc logique qu’il cultive celle-ci pour cultiver son art. Pour autant le culte de soi ne fait pas de toute création de l’art et arrive un moment où une distance s’impose, une confrontation (à soi) indispose et où quelque chose sort de soi qui n’est plus tout à fait soi et par là même d’autant plus propice à répondre à l’autre, à parler à l’autre. Sans doute là la trajectoire de tout artiste porté par son art et que la vie souvent ne ménage pas, par ses hauts et ses bas. 

RIDER GIRL, peinture à l’huile

En publiant son quatrième livre, Bertoche nous livre du Bertoche à pleine page, tout en se (nous) délivrant de Bertoche. A l’issue de son troisième volume, compilant les œuvres qu’il avait faites en suivant le tour ASP pour peindre à chaque étape du championnat, l’artiste s’est retrouvé dans la dèche, avec beaucoup de dépenses accumulées et un huissier le menaçant de lui prendre son atelier. Sans parler des affres induits dans sa vie privée familiale. Mais qu’à cela ne tienne, c’est alors qu’il reprend la route avec sa tournée de peinture dans les surfshops. Une tournée qui le requinque et le conduit à d’autres rencontres fortuites, comme celle de mécènes séduits par son talent et son parcours, lui commandant des toiles… et lui ouvrant un autre monde. Un monde plus lucratif, non sans paillettes, mais où l’âme du surfeur ne se méprend pas, se plaisant justement à surfer à souhait et avec humour ces nouvelles vagues de la vie.

Dans ce livre truffé de tableaux qu’un regard attentionné saura trouver aussi exquis les uns que les autres, Rémi Bertoche raconte avec franchise et simplicité les aventures de cette dernière étape de son parcours. Une fois entamée la lecture de la première ligne, on ne le lâche plus. Comme sa peinture qui happe tout, Bertoche avale son lecteur dans son histoire d’artiste rocambolesque, pleine de rebonds, de situations décalées aussi cocasses que colorées… répondant bien à la générosité expressive du personnage. Car si égocentrique semble l’individu, il n’en est pas moins guidé aussi par son rôle dans sa tribu familiale, recomposée et soudée autour d’un enfant porteur d’un handicap. Et comme dans ses tableaux, son énergie vitale, Rémi Bertoche sait la transmettre. Généreux et attachant à sa façon… comme sa peinture, à sa façon éloquente et unique. Comme l’écrit Alain Gardiner dans la préface du livre, “Il y a des artistes et il y a … Rémi Bertoche.” Ce ART Volume 4 de près de 300 pages vaut largement le voyage…  —GS

Paru dans Surfer’s Journal 137

Livre en vente sur

www.remibertocheart.com

TRIPLE CROWN, peinture à l’huile