Voilà un film documentaire dont le sujet et la forme sonnent frais. Biarritz Surf Gang, une série de dix épisodes de six minutes actuellement sur le web via Studio Plus, a créé le “feu” lors de sa projection en avant-première à Biarritz. Il est au programme du Festival du film de surf d’Anglet du 10-13 juillet.
Au départ, l’idée de deux jeunes surfeur biarrots, Pierre Denoyel et Nathan Curren (fils de Tom) de faire un film sur leurs aînés de la génération années 1980, les surfeurs de la Grande Plage. Les deux garçons n’ont qu’une expérience limitée en audiovisuel, quant à l’histoire qu’ils veulent raconter, elle traite de surfeurs dont les noms sont surtout dans la mémoire locale Mais Pierre et Nathan connaissent ces gars, savent leur parcours, ont vu leurs films de surf de voyage, et mesurent d’autant mieux le lien qui a fait leur bande, qu’eux mêmes vivent une vraie fraternité surf et festive au sein de la leur, l’ALC de la Côte des Basques. Il y a une solide matière pour faire un film marquant. Ils en parlent avec conviction.
Comme tout projet audiovisuel, la concrétisation du rêve de trouver un producteur est un chemin de croix, parsemé de chance. Avec un scénario bien ficélé pour une histoire authentique et forte, le duo prend son bâton de pélerin et va battre le pavé parisien. Une rencontre avec un producteur d’Arte leur ouvre les portes d’une série web sur le réseau de la chaîne publique. Puis chance à nouveau, un producteur exécutif, Raphaël Cassidy, lui-même surfeur, s’intéresse au projet, y repère les atouts d’une histoire pouvant toucher le plus grand nombre, se passionne pour celle-ci et convainc Canal Plus de retenir le film pour une série web.
Tournage des interviews et témoignages des protagonistes, quête des images d’archives, ajout original de séquences de dessins animés, gros travail de mixage et de post-production: le budget du film est conséquent pour les deux novices, mais à leur honneur ils tiennent leur sujet et savent ce qu’ils veulent en faire, clef première de la réussite d’un film.
Et le film est réussi ! Ainsi donc Sammy Sansoube, Pierre Nazeyrollas, Michel Larronde, Joël Darrigues «Nabot», Olivier Nagouas «Kikette», Eric Graciet de se retrouver, avec leur propre histoire, héros d’un film qui fera date. Les gars de la Grande, ce n’est pas une légende. Dans les années 1980, il surfaient comme des branques, faisaient la fête comme des branques, ils gagnaient tout, ils cassaient tout, ils se marraient à donf et la Grande Plage était leur territoire imprenable. Avec Sammy comme leader, l’équipe, bardée de planches Stark, raflait les coupes et autres titres nationaux, mais surtout déployait un surf radical qui n’avait pas à rougir face au surf australien qui était le modéle. Plus longue ta nuit blanche, plus haut ton roller au petit matin !
A cette époque-là, le surf et la drogue s’assemblent souvent, et parfois durement. Deux d’entre eux plongent dans l’enfer de l’héroïne et le film n’en fait pas pudeur, mais sans se larmoyer. La drogue est un piège. Les deux piégés, qui surfent toujours, le disent mieux que quiconque.
Très bien rythmés, alternant les itv, les images d’archives, le dur et le gai, avec intelligence, nuance et humour, ces dix épisodes se regardent en série, comme d’une traite, avec appétit et surprise. De quoi bousculer le classicisme de nombre de documentaires surf anglo-saxons intéressants mais ennuyeux à mourir.
Biarritz Surf Gang, une pépite pour une histoire pleine d’étincelles. Bravo les gars !
Paru dans Surfer’s Journal 120